Bonsoir tout le monde.

Cette semaine je suis à nouveau en vadrouille à vélo, donc ce sera express et fragmentaire — mais, je l’espère, intéressant tout de même.

1. Corrections

  • Il me signale également que laisser les excavatrices enfouies à la fin des chantiers n’est pas une pratique inhabituelle — en 2011, le New York Times racontait ainsi qu’un énorme tunnelier reposerait bientôt sous Park Avenue. Creuser un trou de 15 mètres de diamètre pour le récupérer aurait été problématique, et démonter l’engin aurait coûté plus cher que d’en acheter un neuf, alors en dernière analyse, on lui a fait des funérailles :

    Lors d’une cérémonie officielle cette semaine, l’engin sera scellé derrière un mur de béton ; la chambre sera ensuite remplie de béton, coffrant intégralement la foreuse, à la Han Solo, afin qu’elle puisse servir de structure de soutien au tunnel. Une plaque commémorera le site.

    [Deep Below Park Avenue, a Monster at Rest]

    Je suis tout de même un peu déçu que l’entrepreneur n’ait pas simplement creusé vers le haut jusqu’à déboucher au milieu de l’avenue.

2. Compléments

[La Résidence de France]

  • En août, je vous avais parlé des nombreux oratoires rouges dédiés à St Expédit sur l’île de la Réunion, en oubliant de mentionner le projet 5XP10 des artistes Kid Kréol & Boogie, qui a répertorié les 350 oratoires de l’île en les dessinant. 

    [5XP10, livre édité par le FRAC Réunion]

    Comme l’écrivait à l’époque l’excellent ami à qui je dois d’avoir découvert la Réunion, St Expédit, et quantité d’autres choses :

    S’il fallait choisir un emblème pour l’île, un symbole qui échappe aux représentations folkloriques lessivées par l’industrie touristique, les Saint-Expedit de Kid Kréol & Boogie seraient sans doute des candidats légitimes. Sur le papier, en série, familiers et singuliers à la fois, ces oratoires vides, énigmatiques et flippants, deviennent une sorte de test de Rorschach de la créolité.

    [Archéologues de l’imaginaire]

  • Un aimable lecteur a porté à ma connaissance l’existence de Carl Emil Pettersson, un marin suédois qui s’échoua sur une île de Papouasie-Nouvelle-Guinée en 1904, épousa la fille du roi, et en devint finalement le roi à son tour. Ses aventures furent relatées dans la presse suédoise et le rendirent célèbre, et elles servirent d’inspiration à Astrid Lindgren pour le personne du père de Fifi Brindacier, dont je voulais parlais il y a deux semaines

    [Pettersson vers 1890]

    Une histoire d’île et une vie extraordinaire ? Je ne manquerai pas de vous en reparler sitôt que je serai mieux documenté.

  • Enfin, je vous racontais cet été comment la nécessité d’afficher des caractères complexes avait poussé les PC japonais sur une sorte de Sonderweg au début des années 80, avec des écrans à résolution très élevée mais des capacités d’animation et d’affichage des couleurs comparativement pauvres. J’ai omis de préciser que leur croissance avait notamment été soutenue par des jeux érotiques, voire pornographiques.

    Si vous voulez en savoir plus (sur les aspects techniques, pour les jeux de cul je vous laisse vous débrouiller), je vous recommande en tout cas cet article découvert après l’envoi de la newsletter, avec des détails que je n’avais jamais lus ailleurs et un passage assez intéressant sur le rôle joué par les cartes son. J’ai aussi été tout à fait fasciné par cette archive du Monde Diplo de mai 1991, qui tente d’expliquer à ses lecteurs pourquoi les PC japonais ont dix ans d’avance sur ceux disponibles en Occident, sans pouvoir savoir que Windows 95 va bientôt arriver et ramener le marché japonais à la morne banalité mondialisée.

    Je note aussi que l’histoire s’est répétée quelques années plus tard avec les téléphones portables — qui ont intégré dès 2000 des fonctionnalités très avancées (appareil photo, e-mail, internet, paiement sans contact, etc.) dans des appareils à clapets qui paraissent tout droits sortis d’un monde parallèle. Les Japonais appellent ça « le syndrome des Galápagos ».

3. Et puis

Pour finir, quelques articles qu’on m’a recommandés ou sur lesquels je suis tombé ces dernières semaines :

  • Une analyse un peu verbeuse mais pas déplaisante de la grande scène d’action du Fantastic Mr. Fox de Wes Anderson, et de l’imbrication entre son obsession pour la symétrie et son choix délibéré d’une technique d’animation légèrement cahotée :
  • Et pour finir, un article sur une exploitation florale qui vient de se créer à Montreuil, dans l’enceinte des Murs à pêches, la grande friche agricole de la ville. Pourquoi planter des fleurs ? Parce que la terre est tellement polluée que des légumes qui y pousseraient seraient impropres à la consommation. 

    Au passage, j’ai appris quelques trucs sur le marché de l’horticulture, dont je confesse que j’ignorais tout :

    Les zinnias, dahlias et cosmos cupcakes auront peu voyagé. Huit kilomètres. Une exception car, en France, 85 à 90% des fleurs vendues sont importées, après avoir souvent transité par les serres chauffées des Pays-Bas, la plaque tournante du marché mondial. Mais les Pays-Bas eux-mêmes importent. Les roses, notamment, proviennent souvent du Kenya, premier producteur de roses à l’international (devant Israël et la Colombie). L’industrie, développée là-bas dans les années 1980, y appauvrit les sols, assèche les sources d’eau, avant que les fleurs ne fassent de centaines de kilomètres en avion puis en camions réfrigérés. Les fleurs regorgent par ailleurs de substances chimiques : une étude de 60 millions de consommateurs avait trouvé en 2017 jusqu’à 25 pesticides, dont neuf interdits en France, dans des bouquets de roses vendus dans des grandes enseignes.

[À Montreuil, elles créent une ferme florale urbaine sur une friche polluée]

⌾⌾⌾

Et ce sera tout pour cette semaine.

Portez-vous bien.

M.

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