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Avant toute chose, si vous êtes à Paris ce week-end, je vous signale une projection organisée samedi à 15h aux Amarres, quai d'Austerlitz :

Projection de “Les Enfants Terribles” en solidarité avec les victimes des séismes en Turquie
Veranstaltung von Les Amarres am Samstag, Mai 6 2023

C'est pour la bonne cause, et en plus le film a l'air bien.

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À part ça, cette semaine ce sera surtout des choses à lire, parce que je bosse tellement que je ne vois plus de films. À vrai dire je ne suis guère sorti de chez moi depuis des semaines, à part pour aller à la bibliothèque.

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Bon, si, quand même : lundi j'étais à la manifestation du 1er mai à Paris, en me tenant loin des endroits où ça chauffait parce que je suis vieux et peureux. À un moment nous étions derrière le Pink Bloc, dont des membres utilisaient des couvertures de survie comme drapeau.

Ca m'a fait un pincement au cœur parce que j'ai repensé à une œuvre de l'artiste anglais James Bridle, en 2016, qui avait proposé la couverture de survie comme drapeau universel des réfugiés :

James Bridle / Flag for No Nations
Artist and Writer | Portfolio

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Je suis tombé sur ce texte qui revient sur le Big Lebowski à l'occasion du 25e anniversaire du film — non pour lui rendre hommage, mais pour l'enterrer :

Mais à un moment donné, je me suis rendu compte que, malgré ce frisson philosophique dont je parle, je n'appréciais pas beaucoup The Big Lebowski. (...) En tant que journaliste culturel freelance, il aurait manifestement été dans mon intérêt de faire enrager les fans de Lebowski avec une opinion à contre courant, en pitchant à Slate (évidemment) un article sur le fait que ce film adulé est totalement surestimé (j'ai écrit pour Slate pendant de longues années. C'aurait littéralement été un "Slate pitch"). Je ne l'ai pas  fait. Mais ma méfiance à l'égard de ce film que je n'ai pas aimé m'a inspiré des réflexions plus générales sur l'ironie du jugement esthétique et du débat culturel, qui m'ont été utiles.

[The empty cult of The Big Lebowski]

Le gars cite tous les philosophes qu'il connaît, on dirait qu'il a décidé d'être le plus odieux possible, et son texte est trop long et mal construit, mais fondamentalement je suis d'accord avec lui : je ne vois pas l'intérêt du Big Lebowski. Tout m'y semble un peu faux, en tout cas forcé, juste un peu à côté et gênant, comme une chanson d'Alain Souchon. Le meilleur point de comparaison, c'est peut-être les films d'Edgar Wright : je ne vois pas ce que les gens leur trouvent. Ou, mieux encore, Inherent Vice, qui est encore plus The Big Lebowski que The Big Lebowski, et qui devient hermétique à force de plus savoir de qui il cherche à se moquer.

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Un article sur l'anglicisation de la langue allemande à Berlin (le berlinglish !) qui m'a  fait sourire, parce qu'il va beaucoup plus loin que les platitudes habituelles sur la colonisation par l'anglais et ce qu'implique son statut de lingua franca :

J'aime le fait que les mots empruntés à l'anglais fassent dérailler la grammaire allemande. Une fois je suis tombé sur un fil sur un forum où les gens s'engueulaient sur la question de savoir si le verbe fighten — que, pour une raison quelconque, beaucoup de fans de boxe allemands préfèrent à kämpfen — faisait comme participe passé gefightet, gefighted ou gefaughtet. Certains verbes allemands sont séparables, ce qui signifie qu'on les coupe en deux dans certaines structures ou au participe passé (ausbeuten -> ausgebeutet). Mais comment séparer les mots composés empruntés à l'anglais ? Une fois qu'on dit downloaden pour « télécharger », on doit se demander si son participe passé est gedownloadet ou downgeloadet. Plus récemment, j'ai consacré quinze des précieuses minutes que j'ai à passer dans ce bas monde à me demander si Queerbaiting serait séparable :
Du baitest queer.
• Sie baitet queer.
• Niemand hat die Absicht, queerzubaiten.
• O Harry Styles, bitte, baite mich nicht queer!

[Beamer, Dressman, Bodybag]

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